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mercredi 25 mai 2016

Bernard Ripert va-t-il s'intéresser au scandale des abus psychiatriques après ces trois journées d'internement ?


Il y a de quoi faire pour un véritable défenseur des Droits de l’Homme et des libertés individuelles…


http://www.liberation.fr/france/2016/05/25/bernard-ripert-l-avocat-d-action-directe-interne-d-office-pendant-trois-jours_1455165

Bernard Ripert, l’avocat d’Action directe interné d’office pendant trois jours


 
Bernard Ripert en 2012. L’avocat grenoblois a notamment défendu des complices de Carlos. Photo P. Chignard. Hans Lucas
 

Le défenseur du groupe terroriste d’extrême gauche, qui avait été placé lundi en hôpital psychiatrique sous la contrainte, a finalement été libéré mercredi soir sur décision du préfet. Ses proches dénoncent la vendetta d’un procureur de Grenoble.

 

  • L’avocat d’Action directe Bernard Ripert finalement libéré

L’avocat grenoblois Bernard Ripert, 65 ans n’aura pas passé une troisième nuit en hôpital psychiatrique. Le préfet de Savoie a signé mercredi soir la levée de son hospitalisation sous contrainte, en s’appuyant «sur deux avis psychiatriques concordants», a précisé l’un des avocats de Bernard Ripert, Laurent Pascal.

Défenseur d’Action directe, des complices de Carlos et d’Antonio Ferrara, le pénaliste grenoblois, connu pour sa verve insolente et son goût pour la provocation, avait été interné sous la contrainte lundi soir au centre hospitalier de Saint-Egrève (Isère), puis transféré mardi à l’hôpital psychiatrique de Bassens (Savoie), proche de son domicile, où il avait entamé une grève de la faim, selon un autre de ses avocats, Ronald Gallo.

Le ténor du barreau grenoblois avait été interpellé lundi à son domicile de Détrier, en Savoie, sur réquisition du procureur de la République de Grenoble. Il ne s’était en effet pas présenté à une convocation à l’hôtel de police dans le cadre d’une procédure pour «menaces ou actes d’intimidation envers un magistrat». L’interpellation a été rude : face à son refus d’obtempérer, les forces de l’ordre ont menotté l’avocat avant de le conduire à l’hôtel de police de Grenoble, où il a été placé en garde à vue. «Une dizaine de policiers ont déboulé à notre domicile de Détrier. Une voiture de police bloquait la rue. C’était impressionnant. Hors de proportion. Ils sont allés dans notre chambre et ils l’ont embarqué menotté dans leur voiture», raconte Rose-Marie, l’épouse de Bernard Ripert.

Dans la journée de lundi, l’état de santé de l’avocat – tension élevée – avait nécessité son hospitalisation au CHU de Grenoble, où il a été examiné par un psychiatre à la demande du procureur de la République. D’après ce dernier, le psychiatre a «estimé que M. Ripert était une personne présentant des troubles mentaux qui nécessitaient son placement sous contrainte en hôpital psychiatrique. Je considère, au vu des éléments du dossier, qu’il représente potentiellement un danger pour lui-même et les autres»,a-t-il déclaré au Dauphiné libéré.

Guerre ouverte. C’est néanmoins le préfet qui peut ordonner, selon la loi, une telle «admission en soins sans consentement», sur avis de l’expert psychiatrique. De fait, la garde à vue de Me Bernard Ripert a été levée lundi soir afin de permettre cette hospitalisation. Ce que dénonce Ronald Gallo, pour qui la teneur du bilan psychiatrique invoquée dans l’arrêté préfectoral apparaît très contestable.

Ripert avait été suspendu quatre mois en février, accusé d’entorses à la déontologie de sa profession. Il aurait notamment eu des propos fleuris à l’encontre de confrères ou d’un directeur de prison. Le conseil régional de discipline l’avait néanmoins relaxé le 9 mai. Mais le parquet avait fait appel, prolongeant ainsi sa suspension. Dans un contexte de guerre ouverte entre le conseil et quelques magistrats grenoblois, une audience sur le fond a été fixée au 2 juin, avec en ligne de mire la radiation de Me Bernard Ripert.

Les avocats de Grenoble ont très vigoureusement réagi au traitement réservé à leur confrère. Leur conseil de l’ordre a en effet exprimé sa «sidération devant les conditions d’arrestation» de Bernard Ripert, dénoncé «les moyens judiciaires exceptionnels et disproportionnés mis en œuvre» et «une volonté manifeste d’anéantissement personnel et professionnel d’un avocat». Une centaine d’entre eux se sont réunis en robe, mardi à Grenoble, pour exprimer leur soutien et protester contre «un contexte de dégradation massive des relations entre l’institution judiciaire grenobloise et les avocats».

De Me Ripert, sa consœur Marie-Christine Etelin, elle aussi avocate des membres d’Action directe, dit que «ce n’est pas un avocat qui se couche». Mais «un avocat qui s’engueule avec un procureur, c’est classique», souligne-t-elle aussitôt, pour mieux dénoncer le traitement qui lui a été infligé. «Il a assuré la défense d’Action directe en 1987 et 1994, dans les deux procès à Paris devant la cour spéciale. Son internement en psychiatrie est un nouvel épisode du harcèlement contre cet avocat qui a toujours défendu des militants politiques selon leurs convictions», a réagi de son côté Jean-Marc Rouillan, l’ancien leader d’Action directe.

«Radiation».Que reproche l’institution judiciaire à Me Ripert ? Le 13 mai, au palais de justice de Grenoble, il aurait dévisagé l’un des juges ayant signé sa suspension. C’est ce «regard», perçu comme menaçant, qui a justifié l’ouverture de la procédure pour «intimidation envers un magistrat». Me Gallo s’insurge : son confrère «n’a commis aucun acte d’intimidation… Accorder à un regard une valeur d’intimidation, c’est la démonstration d’un délire paranoïaque de l’institution judiciaire !» Même indignation de la part de son épouse : «C’est écœurant. Hallucinant. Ce sont des pratiques d’une autre époque. Il est en conflit avec un procureur de Grenoble. Ce dernier a fait de sa radiation une affaire personnelle.»

Me Ronald Gallo se dit déterminé à obtenir gain de cause le plus rapidement possible : «A travers le cas Ripert, c’est un débat plus large et grave qui est posé aujourd’hui. En défendant Ripert, je me défends, je défends Eric Dupond-Moretti et tous les confrères qui, un jour ou l’autre, sur un dossier, choisissent de manifester leur indignation de manière véhémente.» Mercredi soir, des rassemblements de soutien à Bernard Ripert ont été organisés à Grenoble et à Chambéry. Peu de temps après, Bernard Ripert est sorti du centre hospitalier spécialisé de Bassens. Libre… et plus remonté que jamais.

François Carrel à Grenoble , Jean-Manuel Escarnot à Toulouse


http://www.liberation.fr/france/2016/05/25/un-rapport-fustige-les-derives-d-hopitaux-psychiatriques_1455035

Un rapport fustige les dérives d’hôpitaux psychiatriques


Par Eric Favereau — 25 mai 2016 à 13:01
 
L’hôpital psychiatrique de Saint-Egrève (Isère), en 2008. Photo Philippe Merle. AFP
 

La contrôleure générale des lieux de privation de liberté publie un rapport qui fait frémir sur la multiplication des pratiques indignes dans les hôpitaux psychiatriques.

 

  • Un rapport fustige les dérives d’hôpitaux psychiatriques

Cela se sait, cela le voit. Depuis quelques années, se multiplient des pratiques de contention et d’isolement systématiques dans les services de psychiatrie en France. Et il ne se passe rien. Ou si peu. On laisse faire, on regarde ailleurs. A l’exception de quelques personnalités comme le député (PS) Denys Robiliard, cela se poursuit dans une relative indifférence des pouvoirs publics. Le ministère de la Santé, ainsi, ne réagit pas. Est ce que le rapport que publie, ce mercredi la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), Adeline Hazan, va changer la donne ?

Un rapport clair, ferme, et inquiétant, que révèle l’Agence France Presse. Pour la première fois depuis sa création en 2008, le CGLPL a établi un bilan thématique de ses 121 visites dans 112 établissements de santé mentale représentant 40% des sites spécialisés en psychiatrie. Il porte sur deux pratiques anciennes qui «connaissent une recrudescence depuis une vingtaine d’années», «l’isolement» ou le placement d’un patient dans un espace fermé qu’il ne peut ouvrir et la «contention mécanique», qui consiste à l’immobiliser par des liens, attaches ou camisoles. «La grande majorité des unités de soins visitées disposent d’une, voire de deux chambres d’isolement et de matériel de contention», explique le rapport.

Pour le CGLPL, le développement de ces pratiques s’explique par «une réduction des effectifs», «la présence insuffisante des médecins», «une évolution de l’approche psycho pathologique» et «un manque de réflexion d’ensemble sur la liberté de circulation des patients». «L’impératif de sécurité» est également mis en avant, souligne Adeline Hazan, pour qui le malade mental «ne bénéficie pas de la représentation qui s’attache à toute maladie : souffrance, fragilité, besoins de soins, compassion» en raison d’un présupposé sur sa dangerosité, «plus alimenté par le traitement médiatique d’événements exceptionnels que par une réalité statistique d’un quelconque danger».

Défaillances dans la surveillance


Parmi ses observations, elle constate un détournement de l’utilisation de ces outils, prévus pour faire face à des situations de crise limitée dans le temps, à des fins disciplinaires ou de sanction, «certains services allant jusqu’à établir un barème en jours d’isolement en fonction de la transgression à des règles fixées».

Certains règlements intérieurs prévoient un séjour systématique des patients à l’isolement lors de leur admission pour des durées pouvant atteindre quinze jours. Quant aux détenus, ils sont systématiquement placés en chambre d’isolement. L’isolement est plus affaire de «culture de service» que de type de patient. Sa durée est variable et l’organisation des chambres n’est pas normalisée. Les modalités de contention ne sont pas plus uniformes allant de deux membres à quatre membres, au buste et au bassin attachés», constate le rapport.

Concernant les atteintes aux droits fondamentaux des patients, le rapport mentionne des défaillances dans la surveillance, l’absence de sonnette d’appel. «Certains, attachés, n’ont d’autre choix que d’attendre le passage d’un infirmier, parfois seulement toutes les deux heures et moins la nuit, pour obtenir à boire, demander le bassin ou signaler un malaise.»

Rapport terrifiant


Le droit à l’intimité est bafoué par le développement de la vidéosurveillance, voire l’installation de micros et de caméras thermiques «attentatoires à la dignité des patients», dénonce le CGLPL, qui déplore également «les interdictions de visite», des patients obligés de manger par terre en utilisant leur lit comme table, l’obligation du port du pyjama sans justification médicale et l’absence d’activité. Parmi les patients, «le sentiment d’incompréhension voire de punition domine», écrit le CGLPL. «Tout doit être mis en œuvre pour apaiser la personne en situation de crise avec des approches alternatives à une mesure de contrainte physique», écrit dans ses recommandations la contrôleure. Elle prône une traçabilité de ces pratiques avec la tenue d’un registre et une information de la personne concernée et de ses proches sur ses droits.

Elle souhaite qu’un examen psychiatrique préalable soit systématiquement réalisé et que la décision soit motivée pour justifier son caractère «adapté, nécessaire et proportionné». «La mesure de contrainte physique doit être la plus courte possible et ne saurait dépasser la situation de crise.» Sans une nouvelle décision, elle ne doit pas dépasser vingt-quatre heures pour l’isolement et douze pour la contention.

Sera-t-elle entendue ? Faut-il rappeler, il y a deux mois, le rapport terrifiant qui avait été déjà publié sur l’hôpital psychiatrique de Bourg-en-Bresse, où des patients étaient enfermés, attachés pendant plusieurs mois? Le ministère de la santé, comme l’Agence régionale de la santé, n’avait pas réagi. Faut-il souligner l’appel lancé, en septembre dernier par le collectif des 39 «Non à la contention»? Peu ou pas d’échos. Comme si ce qui se passe dans les hôpitaux psychiatriques tombait désespérément dans un trou noir.

Eric Favereau


http://www.lequotidiendumedecin.fr/actualites/article/2016/05/25/isolement-et-contention-la-cglpl-appelle-le-monde-de-la-psychiatrie-sinterroger_812151#

Isolement et contention : la CGLPL appelle le monde de la psychiatrie à s’interroger

 

Coline Garré
| 25.05.2016
 

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) Adeline Hazan, entend porter sur la place publique le débat sur l’isolement et la contention dans les établissements de santé mentale, en publiant chez Dalloz ce 25 mai un rapport thématique sur ce sujet, présenté comme une seconde privation de liberté, dans une première (l’hospitalisation sans consentement).

Pas de preuve scientifique

Adeline Hazan incite en priorité les professionnels de la psychiatrie à une remise en cause de leurs pratiques, alors que le phénomène se généralise sans qu’ « aucune étude scientifique menée n’affirme l’efficacité thérapeutique de la contention ou de l’isolement » lit-on.

« Depuis 15-20 ans, on constate leur augmentation, sans que personne ne l’explique : baisse des traitements médicamenteux, manque de personnel, culture de la profession, du service ? », interroge Adeline Hazan. « Il est rare que les établissements n’y recourent jamais. Partout, nous avons constaté au moins une chambre d’isolement », décrit-elle.

« Le constat fondé sur la visite de 121 établissements de santé mentale (centres hospitaliers spécialisés et services psychiatriques d’hôpitaux généraux, unités pour malades difficiles et unités hospitalières spécialement aménagées), soit 40 % des 284 établissements recensés, fait état d’une grande diversité des pratiques, « entre les structures, mais aussi en leur sein, ce qui pose le problème de l’égalité de chacun face aux droits fondamentaux », souligne la CGLPL.

Banalisation et systématisation

Il existe d’évidents scandales, comme au centre psychothérapeutique de l’Ain, ou dans d’autres établissements où une chambre d’isolement mesure 6,20 m2, où un barème de jours de mise à l’isolement a été mis en place pour sanctionner des « comportements inadaptés » dans une perspective disciplinaire. La CGLPL dénonce tout aussi sévèrement une banalisation de la contention dans les chambres des patients, la systématisation de la mise à l’isolement des personnes détenues transférées en hôpital, l’absence de médiations mises en œuvre avant une contention (qui doit n’intervenir qu’en dernier recours), l’absence d’examen médical, la prescription de ces mesures assortie de la mention « si besoin », ou encore l’insuffisance de la surveillance par le personnel.

Adeline Hazan s’offusque encore des atteintes à l’intimité, en raison de la vidéo-surveillance, à la dignité (seau hygiénique, chaise percée, port du pyjama sans justification), ou de l’insuffisance des liens maintenus avec la famille.

La loi du 26 janvier 2016, une grande avancée… en théorie

Malgré le référentiel de l’ancienne Haute autorité de santé (HAS) de 1998 et les recommandations du CGLPL, le cadre réglementaire et législatif de la contention et l’isolement faisait défaut… au moins jusqu’à la loi de modernisation de notre système de santé, du 26 janvier 2016.

« Elle inscrit dans le code de santé publique que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours, sur décision d’un psychiatre, pour une durée limitée. Elles doivent être consignées dans un registre et les établissements doivent fournir un rapport annuel avec le nombre de placement à l’isolement et les moyens employés pour les éviter », se félicite Adeline Hazan, évoquant « une grande avancée ».

À quelques bémols près : « les médecins, les cadres de santé et les directeurs ne semblent pas informés. Il n’y a pas de prise de conscience de la part des établissements et des agences régionales de santé (ARS) de l’importance de cette loi et pas de changement sur le terrain », déplore Adeline Hazan. Le ministère de la Santé lui indique (depuis plus d’un mois) que la circulaire d’application est en cours de signature : « Cette loi est d’application immédiate », rectifie la CGLPL.

Des recommandations

Parmi ses recommandations, le contrôleur général des lieux de privation de liberté demande un recensement (qualitatif et quantitatif) des mesures de contention et d’isolement au niveau régional et national, et non seulement par établissement.

Elle réclame une meilleure notification de leurs droits aux malades (via la remise d’un support écrit et un affichage dans la chambre d’isolement), l’interdiction de la vidéosurveillance, la limitation de la durée de l’isolement à 24 heures et de la contention à 12 heures, la réalisation d’un examen psychiatrique préalable à la décision, ou encore la preuve de son caractère adapté, nécessaire et proportionné.

Source : Lequotidiendumedecin.fr
 

http://www.infirmiers.com/votre-carriere/votre-carriere/isoler-et-contraindre-des-mesures-de-dernier-recours.html

PSYCHIATRIE

Isoler et contraindre : des mesures de dernier recours…


25.05.16 Mise à jour le 25.05.16

Cet article fait partie du dossier :


La conférence des présidents de commission médicale d’établissement (CME) de centre hospitalier spécialisé (CHS) détaille 12 principes généraux concernant les pratiques d’isolement et de contention en psychiatrie.

homme dépression tristesse
La décision d’isolement ou de contention doit faire l’objet d’une concertation avec l’équipe de soins et prendre en compte notamment l’évaluation du bénéfice/risque…

L’isolement et la contention sont des pratiques récemment encadrées par la loi de santé et très régulièrement pointées du doigt par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) Le CGLPL devait présenter mercredi un rapport spécifique sur ces pratiques. Dans son document dévoilé volontairement avant la présentation de ce rapport, la conférence des présidents de CME de CHS rappellait que les pratiques de restriction de liberté en établissements hospitaliers autorisés en psychiatrie sont encadrées par des textes législatifs et réglementaires et qu’elles font l’objet de recommandations et de démarches qualité dans le cadre de la certification des établissements de santé menée par la Haute autorité de santé [HAS].

Elle écrit que ces ces pratiques s’inscrivent dans un processus complexe justifié par l’état clinique du patient et comprenant de nombreux aspects : une décision, un accompagnement humain, une délivrance de soins et une surveillance professionnelle de proximité. Elle insiste sur le fait qu’elles ne peuvent pas relever de la banalité de la pratique quotidienne et en aucun cas constituer une réponse à des questions d’ordre disciplinaire, d’effectifs soignants ou [de] convenance institutionnelle. L’histoire de l’institution hospitalière a montré qu’aucun acteur du soin, quelles que soient ses compétences et son expérience, n’est à l’abri de contre-attitudes négatives et de perte de maîtrise de soi dans sa pratique hospitalière. Il s’agit donc d’un domaine qui exige une vigilance toute particulière d’un point de vue éthique médical et légal ainsi que de prendre la mesure de ce que toute privation ou restriction de liberté implique pour chacun, patient ou soignant, commente aussi la conférence.

Des mesures de dernier recours


Passé ce préambule, elle édicte ses principes généraux. D’abord, il s’agit de mesures dites « de dernier recours » et leurs indications ne peuvent être portées que sur la base de la constatation de son état clinique. Ensuite, la décision doit être prise par « un praticien senior » qui doit justement s’assurer du caractère dit « de dernier recours »  de la mesure. « A cet égard, il retranscrit dans le dossier du patient les actions menées au préalable pour éviter cette mesure et il est informé sans délai de sa mise en place. En cas de nécessité entrant dans le cadre du rôle propre infirmier, le praticien senior confirme s’il y a lieu la mesure dans l’heure qui suit sa mise en place à la suite d’un examen médical, indique aussi la conférence. Troisième principe : la décision d’isolement ou de contention ne peut être anticipée par un certificat médical indiquant si besoin, ni être systématisée, notamment en raison de la situation administrative du patient (soins sans consentement, personne détenue etc.). Ce sont des pratiques que le CGLPL a souvent remarqué, note-t-on.

La décision d’isolement ou de contention fait l’objet d’une concertation avec l’équipe de soins et prend en compte notamment l’évaluation du bénéfice/risque, édicte ensuite la conférence. Dans toute la mesure du possible, les professionnels s’efforcent d’expliquer au patient pourquoi cette mesure ne peut pas être évitée, précise-t-elle. Elle note aussi que la décision d’utiliser la contention ou l’isolement doit être individualisée, assortie le cas échéant d’une prescription médicamenteuse, basée sur la prise en compte de l’intérêt du patient dans un but thérapeutique et évaluée au regard de l’évolution de son état clinique. Cette décision doit être motivée, inscrite dans le dossier du patient et horodatée, avec la précision de sa durée et, le cas échéant, le type de contention, y est précisée ainsi que l’absence de contre-indications somatiques.

Le sixième principe concerne le programme individualisé de surveillance de l’état clinique et de prévention des risques, qui doit prévoir notamment un examen médical somatique dans les deux heures qui suivent le début de la mesure d’isolement, un minimum de deux examens médicaux quotidiens et une évaluation infirmière au minimum toutes les heures, et la possibilité pour le patient de solliciter un soignant si nécessaire. Septième principe, la contention est décidée pour une période maximum de 12 heures, l’isolement pour une période maximum de 24 heures et sa reconduction nécessite systématiquement un examen par un praticien senior et les mêmes justifications qu’à l’origine de la mesure. Là encore, la conférence insiste la nécessaire traçabilité de toutes les décisions prises.

Ensuite, l’isolement et la contention sont réalisés dans des espaces dédiés dont l’architecture a été conçue pour contribuer à la qualité des soins dans ce contexte particulier et par un personnel suffisamment expérimenté et formé aux enjeux éthiques et aux difficultés de mise en oeuvre de ces pratiques, souhaite la conférence, insistant sur les conditions matérielles et notamment d’hygiène et de sécurité. Par ailleurs l’utilisation de vêtements autres que ceux du patient ne doit être strictement limitée et réservée qu’à de rares situations motivées par des arguments cliniques et/ou d’hygiène. Elle ne peut en aucun cas être systématisée pour des motifs institutionnels. Le CGLPL s’est étonné à plusieurs reprises de mises en pyjama parfois un peu trop systématiques, note-t-on. La conférence précise enfin que la disponibilité de sa chambre doit être assurée au patient à tout moment dès l’amélioration de son état clinique.

Des données transmises à l’ARS


Les derniers principes concernent l’organisation institutionnelle des établissements de santé. Ainsi, le début et la fin de toute mesure d’isolement ou de contention sont portées à la connaissance du praticien hospitalier d’astreinte, de l’interne et du cadre de garde et est signalée en temps réel au service de sécurité incendie de l’établissement. De plus, les situations des patients en isolement ou contention sont reprises lors des réunions institutionnelles de l’unité d’hospitalisation, au minimum de façon hebdomadaire et la traçabilité en est assurée dans le dossier du patient et elles sont portées à la connaissance du JLD [juge des libertés et de la détention] à chacun de ses passages dans l’établissement. Enfin, la gestion de la disponibilité des chambres d’isolement engage la solidarité institutionnelle des responsables médicaux et administratifs des pôles.

Par ailleurs, la CME de l’établissement est enjointe à faire de la réduction au strict minimum des pratiques de contention et d’isolement un axe fort de sa politique de qualité et de sécurité. Cet aspect doit faire systématiquement l’objet d’un volet spécifique de son projet médical. Dans cette perspective, la CME est informée chaque trimestre dans le cadre de son agenda qualité de la situation quantitative et qualitative de ces mesures. Sur la base du registre prévu par la loi [de santé, NDLR], l’établissement établit annuellement en lien avec la CME et le DIM [département d'information médicale] un rapport rendant compte des pratiques d’isolement et de contention, et de la politique qu’il définit et met en oeuvre pour en limiter le recours.

Ce rapport est transmis à la commission des usagers, au comité d’éthique et au conseil de surveillance pour avis, ainsi qu’à l’agence régionale de santé (ARS) pour une analyse régionale de ces pratiques, précise la conférence. Le 12ème principe édicté est plutôt un souhait. Elle demande à nouveau la mise en place d’un observatoire national de ces pratiques dans les établissements publics de santé. Cet observatoire serait de nature à assurer un traitement objectif de ces pratiques, pour réaliser une analyse critique des données fournies régionalement par les ARS et en interpréter qualitativement et quantitativement les évolutions dans la perspective d’en limiter à terme le recours, estime-t-elle.

Principes généraux concernant les pratiques d’isolement et de contention en psychiatrie, conférence nationale des présidents de CME de CHS, mai 2016 (PDF)

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